Le prix Nobel de la paix 2018, Denis Mukwege a plaidé de nouveau mercredi pour la création d’un Tribunal pénal international pour la RDC, afin notamment de donner suite au « Rapport mapping » du Haut-commissariat des Nations unies aux droits de l’homme, portant sur 617 violations les plus graves des droits de l’homme et du droit international humanitaire commises de 1993 à 2003 sur le territoire congolais.
Le peuple congolais a aussi, insiste Mukwege, droit à son Nuremberg (Ndlr. procès qui s’est déroulé du 20 novembre 1945 au 1er octobre 1946, sous la juridiction du Tribunal militaire international siégeant à Nuremberg, contre 24 des principaux responsables de l’Allemagne nazie, accusés de complot, crimes contre la paix, crimes de guerre et crimes contre l’humanité).
Denis Mukwege a fait cette déclaration mercredi 2 août à l’occasion de la célébration du Génocost, « le génocide pour des gains économiques » commis contre les Congolais.
« Les Congolaises et les Congolais ont aussi droit à leur Nuremberg, et nous appelons à la création sans plus tarder d’un Tribunal International Pénal pour la RDC et des chambres spécialisées mixtes dans le cadre des efforts pour mettre en œuvre tous les outils de la justice transitionnelle en vue d’enrayer la spirale de la violence et de l’impunité », a-t-il plaidé.
Depuis plus de deux décennies, l’Est de la RDC vit dans l’instabilité imposée par certains pays voisins pour des intérêts économiques. Mukwege a rappelé que le système économique globalisé est en grande partie articulé sur les ressources minières et les richesses naturelles qui se trouvent en RDC, et qui sont indispensables pour assurer la croissance économique des grandes puissances et du monde des entreprises.
Ainsi, dénonce-t-il, l’instabilité politique et sécuritaire que les Congolais subissent est entretenue pour satisfaire les besoins en matières premières du marché mondial, tout en laissant la population et les communautés meurtries et traumatisées dans un état de pauvreté inacceptable.
Face à cette situation, il pense qu’il est temps de mettre fin au paradoxe de l’abondance en RDC et à la tragédie congolaise. Alors que plusieurs générations de Congolais ont déjà été sacrifiées pour la révolution de l’automobile et de la communication, « va-t-on encore accepter que les générations futures soient assujetties et anéanties pour que le monde économiquement développé puissent à bas prix avancer vers une transition énergétique dite « verte », mais en vérité « rouge » du sang des femmes et des enfants congolais ? », s’est-il interrogé.
« Il y a urgence à mettre fin à l’extraction illicite et au commerce illégal des ressources minières et à la culture de l’impunité qui, avec l’absence d’un leadership congolais respectable et respecté, sont les principales causes profondes de la récurrence des conflits et de la répétition des crimes les plus graves », a-t-il souligné.
Dans ce contexte, Denis Mukwege a salué le fait que le législateur congolais ait reconnu en décembre 2022 le 2 août comme journée commémorative du génocide congolais, suite à un long travail de plaidoyer des organisations de la société civile.