Dans un interview accordée jeudi 14 mars au média kenyan NTV, le président rwandais Paul Kagame est revenu longuement sur le conflit rwando-congolais. Il a répondu notamment aux accusations de son homologue congolais Félix Tshisekedi selon lesquelles le Rwanda agresse la RDC pour piller ses ressources minières.
La zone minière de Rubaya, capitale du coltan, située dans le territoire de Masisi au Nord-Kivu, est encerclée par les rebelles du M23 soutenus par l’armée rwandaise. Sans nier l’implication de son pays dans ce pillage, Paul Kagame a indiqué qu’il y a plusieurs acteurs qui font main basse sur les minerais stratégiques de la RDC et par conséquent, entretiennent le conflit armé qui perdure depuis 30 ans.
« Ils ont retourné contre nous ce qui les intéresse… Ils disent maintenant que le Rwanda s’intéresse aux minerais congolais. Je pense qu’il y a des gens plus intéressés par les minéraux que le Rwanda et ce sont eux qui entretiennent le problème », a-t-il dit.
Selon l’Office rwandais des mines, (depuis la prise de Rubaya) les recettes d’exportation de minéraux du Rwanda en 2023 ont augmenté pour atteindre le record de 1,1 milliard de dollars.
Thierry Vircoulon qui travaille en RDC depuis 2003 en tant qu’expert pour la Commission européenne, a confirmé ce pillage. « Les chiffres ont été très bons en 2023, mais tout le monde sait très bien que leurs chiffres de production et d’exportation ne collent pas. Il n’y a pas de mystère. Les chiffres augmentent à cause de ce contrôle et parce qu’ il y a toujours cette contrebande importante dans la région du Kivu, et ce, malgré les initiatives de traçabilité mises en œuvre », a-t-il expliqué.
Même s’il est prêt à rencontrer Félix Tshisekedi pour résoudre la crise entre les deux pays, Paul Kagame a affirmé cependant que la question du M23 est un problème congolo-congolais.
« Les M23 dont vous avez entendu parler sont de nationalité congolaise. Je n’ai aucune responsabilité là-dedans, c’est arrivé avant même ma naissance. Nous avons 100 000 réfugiés de RDC au Rwanda », a déclaré le président rwandais.
Contrairement à Tshisekedi qui a mis en veilleuse ses velléités belliqueuses, Kagame a réaffirmé sa disposition à intervenir militairement en RDC si la sécurité du Rwanda est menacée.
« J’ai dit à plusieurs reprises devant la caméra que si la sécurité du Rwanda est menacée, je n’ai besoin de la permission de personne pour faire tout ce que je dois faire pour garantir la protection du Rwanda », a-t-il souligné.
Les deux chefs d’État pourraient se rencontrer dans les prochains jours sous la médiation du président angolais João Lourenço, qui encourage une solution diplomatique au conflit rwando-congolais.