Se dirige-t-on vers un sabotage des initiatives régionales visant à instaurer une paix durable dans l’Est de la RDC ? Alors que les processus de paix de Nairobi et de Luanda, encouragés par l’ONU, sont sur le point de produire des résultats positifs, le président rwandais, Paul Kagame, parrain de plusieurs groupes armés, vient de jeter un véritable pavé dans la mare en remettant en cause les frontières héritées de la colonisation. Selon lui, la vraie cause de cette crise sécuritaire est le découpage territorial opéré lors de la Conférence de Berlin.
La partie orientale de la RDC est en proie à l’insécurité depuis plus de deux décennies. La responsabilité du Rwanda dans cette situation a été prouvée notamment l’ONU. Dimanche 16 avril, le président de la commission sénatoriale des relations étrangères des USA, a déclaré qu’ « il est grand temps pour les partenaires internationaux d’exiger le retrait du Rwanda de la RDC et de faire face aux conséquences de ses abus ».
Rejetant toujours l’implication de son pays dans la déstabilisation de la RDC, Paul Kagame a, lors de sa visite d’Etat au Bénin, déclaré samedi que cette crise doit être comprise au-delà de la question du M23, groupe armé actif dans l’Est de la RDC soutenu, selon le rapport du groupe d’experts de l’ONU, par l’armée rwandaise.
« Les frontières qui ont été construites durant la période coloniale ont affecté et divisé nos peuples. Une partie du Rwanda qui a été donnée au Congo…Il faut trouver la solution à cette crise », a-t-il déclaré.
Ces propos viennent de donner raison au président congolais, Félix Tshisekedi qui, lors de sa dernière adresse sur l’état de la nation, a condamné « les velléités expansionnistes du Rwanda sous couvert du M23 ».
En remettant en cause les frontières orientales de la RDC, Paul Kagame viole l’article 4 (b) de l’Acte constitutif de l’Union africaine (UA) qui exige le « respect des frontières existant au moment de l’accession à l’indépendance ».
Le président rwandais, qui a dirigé l’UA en janvier 2018 et février 2019, ne montre aucun respect pour les textes régissant l’organisation continentale, à savoir que ses propres vont également l’encontre de la résolution de la Conférence des chefs d’État et de gouvernement adoptée en 1964 au Caire.
Tenue du 17 au 21 juillet 1964, la première session ordinaire des chefs d’État et de gouvernement a décidé que « tous les Etats membres s’engagent à respecter les frontières existant au moment où ils ont accédé à l’indépendance ».
Il est désormais clair que le soutien rwandais aux groupes armés qui écument l’Est de la RDC vise à faire aboutir le projet de balkanisation de ce territoire riche en ressources minières.
Dénonçant une « nouvelle provocation » rwandaise, la RDC se dit déterminée à défendre son intégrité territoriale.
« Kagame transgresse l’histoire, ses propos constituent une nouvelle provocation. Ce qu’il ne dit pas ce qu’il est la cause de l’insécurité à l’Est, créateur du RCD, CNDP, M23. Ce qu’il ne doit jamais oublier ce que nous défendrons chaque centimètre de notre territoire », a réagi Patrick Muyaya, porte-parole du gouvernement congolais.