« L’Eglise catholique n’est pas neutre », répond le Cardinal Fridolin Ambongo aux accusations selon lesquelles lui et la CENCO se mêlent trop de la politique en prenant souvent des positions contre le gouvernement. Dans un contexte où, dénonce-t-il, l’homme congolais n’a jamais été, depuis l’indépendance, au centre des préoccupations des dirigeants, l’archevêque métropolitain de Kinshasa affirme que l’Eglise ne peut pas garder une attitude de neutralité.
Observer la neutralité, c’est prendre position « pour les puissants contre les faibles », a-t-il dit, précisant que seuls ceux qui font souffrir la population sont dérangés par les opinions des prélats, alors que « ceux qui arrivent au pouvoir mettent l’accent tout de suite sur leur intérêt personnel ».
« Je dis toujours que l’Eglise catholique, surtout le cardinal, n’est pas neutre. Jésus-Christ n’était pas neutre. Sur cette question là, la classe aurait aimé voir l’Eglise catholique ou le cardinal du Congo, garder une attitude de neutralité par rapport à leurs actions. Mais si l’Eglise catholique arrive à ça, c’est que l’Eglise a pris position pour les puissants contre les faibles. Or, nous nous avons levé l’option d’accompagner notre peuple dans sa quête d’un peu plus de dignité et naturellement notre prise de position agace ceux qui font souffrir le peuple », a-t-il déclaré dans un entretien accordé au média catholique KTOTV.
Selon Ambongo, le « malheur » de la RDC provient de « l’irresponsabilité » des Congolais, particulièrement des dirigeants, et de la combinaison des intérêts économiques des firmes pétrolières et minières qui utilisent certains pays voisins, dont le Rwanda, pour piller les ressources naturelles.
« Quand je vois le sort de mon pays, de mon peuple, je pense tout de suite à l’expérience de cet homme arrêté par les bandits, tabassé, roué de coups et abandonné au bord de la route, et tout le monde passe à côté, mais on le regarde et puis on tourne le regard jusqu’à ce que ce soit un Samaritain qui est venu à son aide. Donc, la RDC est aujourd’hui dans cette situation là. Mais la cause principale, je vois sur deux plans. Premièrement, il y a une cause interne, ce qu’on appelle la mauvaise gouvernance des Congolais eux-mêmes parce qu’on se demander pourquoi cela n’arrive qu’au Congo et pas ailleurs. L’autre cause, c’est une sorte de combinaison d’intérêts économiques de grandes compagnies pétrolières, forestières et minières qui veulent opérer au Congo mais en se servant parfois des pays voisins, d’où toute la colère actuelle au Congo vis-à-vis du Rwanda », a-t-il expliqué.
Lors du séminaire organisé par le Symposium de la Conférence épiscopale d’Afrique et de Madagascar (SCEAM), du 8 au 10 mars 2024 au Ghana, sur le thème « les conflits en Afrique dans le contexte de l’exploitation des ressources naturelles et minières », Fridolin Ambongo a souligné le scénario paradoxal selon lequel d’importants investissements étrangers dans le pétrole, le gaz, l’exploitation minière et les ressources naturelles ne bénéficient pas suffisamment aux populations locales.
Face à cette situation, il a soulevé l’urgence pour l’Église en Afrique d’adopter une approche pastorale de l’écologie intégrale et de la conversion écologique inspirée par sa doctrine sociale, notamment en ce qui concerne les industries extractives.