Le secrétaire général de l’ONU, António Guterres a exigé lundi la correction de « l’injustice historique » dont est victime l’Afrique, sous-représentée au niveau, notamment du Conseil de sécurité depuis 1945. Il a jugé inacceptable que le principal organe de paix et de sécurité du monde ne donne pas de voix permanente à un continent qui compte plus d’un milliard d’habitants, à la population jeune et en croissance rapide, et qui regroupe 28 % des membres de l’ONU.
Sous la présidence de la Sierra Leone, le Conseil de sécurité de l’ONU a tenu aujourd’hui un débat de haut niveau au tour du thème : « Répondre à l’injustice historique et renforcer la représentation effective de l’Afrique au Conseil de sécurité de l’ONU ». La séance a été dirigée par le président Julius Maada Bio.
Dans son allocution, António Guterres a rappelé que cet organe a été pensé par les vainqueurs de la seconde guerre mondiale et reflète les structures de pouvoir de l’époque. Cependant, a-t-il soutenu, le monde a changé depuis 1945. Et l’Afrique n’a toujours pas un représentant permanent, une injustice qui doit être corrigée, a-t-il exigé.
« En 1945, la plupart des pays d’Afrique actuels étaient encore sous domination coloniale et n’avaient pas voix au chapitre dans les affaires internationales. Cela a créé une omission flagrante qui n’a toujours pas été corrigée : il n’y a pas de membre représentant permanent de l’Afrique au Conseil de sécurité, et le nombre de membres élus issus du continent n’est pas proportionnel à l’ importance de ce dernier. Nous ne pouvons accepter que le principal organe de paix et de sécurité du monde ne donne pas de voix permanente à un continent qui compte plus d’un milliard d’habitants, à la population jeune et en croissance rapide, et qui regroupe 28 % des membres de l’ONU. Nous ne pouvons pas non plus accepter que les vues de l’Afrique sur les questions de paix et de sécurité soient insuffisamment prises en compte, tant sur le continent que dans le monde », a déclaré le patron de l’ONU.
Cette injustice persiste, alors que l’Afrique, reconnaît Guterres, a prouvé, depuis le début, qu’elle avait la volonté et les capacités requises pour être un partenaire pour la paix, en particulier en collaboration avec l’ONU, tant sur le continent qu’ailleurs dans le monde.
Dans ce contexte, il a rappelé que les pays africains accueillent près de la moitié des opérations de maintien de la paix des Nations unies et fournissent depuis des années des contingents dans les zones de tension de la planète, notamment maintenant au Liban.
« Plus de 40 % des soldats de la paix sont africains.Il ne faut pas non plus oublier les efforts considérables déployés par les forces sous conduite africaine pour rétablir la paix – de la Somalie au lac Tchad en passant par le Mozambique et la République démocratique du Congo », a-t-il dit, souligant qu’en période de crise et de divisions géopolitiques, les pays africains sont souvent parmi les premiers ministres à défendre la paix, les solutions multilatérales et le respect du droit international et de la Charte des Nations unies.
« Mais la représentation de l’Afrique n’est pas à la hauteur de ses efforts et contributions », a-t-il dénoncé, faisant remarquer que, garantir la crédibilité et la légitimité du Conseil suppose de tenir compte des appels lancés depuis longtemps par l’Assemblée générale des Nations unies, par divers groupes géographiques, le Groupe des États arabes, les pays du Benelux, les pays nordiques et les pays de la Communauté des Caraïbes, et par certains membres permanents du Conseil lui-même afin de remédier à cette injustice.
Selon lui, pour que différentes régions du monde puissent contribuer aux travaux du Conseil, la réforme de sa composition doit s’accompagner d’une démocratisation de ses méthodes de travail.
« Le Nouvel Agenda pour la paix propose un certain nombre d’idées, allant d’une meilleure répartition des tâches entre les membres du Conseil à la tenue de consultations plus systématiques avec les États hôtes et les organisations régionales, ainsi qu’avec les pays qui fourniture des contingents ou du personnel de police. Il appelle également à des améliorations et à des innovations concernant d’autres parties de l’architecture mondiale dont les travaux ont une incidence sur la paix et la sécurité », a-t-il expliqué.
António Guterres est catégorique : La voix de l’Afrique, les idées de l’Afrique et la participation de l’Afrique doivent être pleinement prises en compte dans les délibérations et les travaux du Conseil.
Pour le SG de l’ONU, ce n’est pas seulement une question d’éthique et de justice, mais aussi un impératif stratégique susceptible d’accroître l’acceptation globale des décisions du Conseil de sécurité dans l’intérêt de l’Afrique et du monde.
Ainsi, a-t-il exigé à tous les États membres de saisir cette occasion pour définir un Pacte pour l’avenir ambitieux, qui ouvre la voie à une architecture mondiale de paix et de sécurité représentant véritablement tous les pays, sur un pied d’égalité.
Le Conseil de sécurité se compose de 15 membres, dont cinq membres permanents : Chine, États-Unis d’Amérique, Fédération de Russie, France et Royaume-Uni, et 10 membres élus par l’Assemblée générale pour un mandat de deux ans.