Point d’accès crucial à l’aide humanitaire dans l’est de la RDC, l’aéroport de Goma est inopérationnel depuis la prise de la ville par les rebelles du M23 en Janvier 2025. Le Rwanda qui, selon l’ONU, a joué un « rôle déterminant » dans la conquête et l’occupation de Goma, a imposé un blocus. L’administration Kagame a rejeté jeudi la position du président français Emmanuel Macron concernant la reprise des opérations aériennes humanitaires, alors que plus de 21 millions de personnes ont besoin d’aide humanitaire.
A la clôture de la Conférence de Paris sur la paix et le développement dans la région des Grands Lacs, Emmanuel Macron s’est réjoui de la mobilisation internationale autour de ce forum et des décisions majeures qui en sont issues, notamment la réouverture de l’aéroport de Goma aux vols humanitaires, ainsi que la mobilisation d’un milliard et demi d’euros, destinés à l’assistance des populations les plus vulnérables.
Le président français a souligné que cet ensemble d’actions s’inscrit dans une synergie complète avec toutes les initiatives régionales et internationales, afin de répondre en profondeur à l’urgence humanitaire et de replacer l’humain au cœur des priorités.
Dans sa réaction, le chef de la diplomatie rwandaise, Olivier Nduhungirehe, qui a représenté Paul Kagame à ces assises, a rejeté la position française. « La position du Rwanda est de s’assurer que les décisions soient prises dans le cadre des négociations de Doha. C’est dans ce cadre là que cette décision doit se faire », a-t-il dit.
Le M23, quant à lui, a jugé « inopportun » l’appel lancé par la France pour la réouverture de l’aéroport de Goma. « Il n’y a plus d’urgence humanitaire », a tranché la milice soutenue par l’armée rwandaise, exhortant Paris à éviter toute prise de position susceptible de rappeler aux peuples de la région des Grands Lacs son « passé triste et malheureux ».
Selon l’ONU, cette situation humanitaire est parmi les pires au monde. Rien que cette année, a déploré Antonio Guterres, des centaines de personnes ont été tuées dans des violences armées et des milliers ont été blessées.
Le tableau est sombre : Plus de 21 millions de personnes ont besoin d’aide humanitaire. 5,7 millions de personnes sont déplacées. Plus de 27 millions de personnes sont en situation d’insécurité alimentaire. Les services essentiels s’effondrent, notamment la santé, l’eau et l’assainissement, et l’éducation. Les cas de choléra sont en augmentation. Des rapports horrifiants font état de recrutements forcés, d’exécutions et de violences sexuelles et sexistes.
La RDC jalouse de sa souveraineté
Il ne revient pas à la coalition M23-RDF de décider de la réouverture ou non de l’aéroport de Goma qui, a tonné Patrick Muyaya, porte-parole du gouvernement congolais, « se fera uniquement sur autorisation des autorités congolaises et uniquement pour des vols humanitaires qui seront effectués en journée ».
D’après Kinshasa, « ce n’est ni l’agitation du père, le Rwanda encore moins celle du fils, le M23 qui remettra en cause l’engagement de ceux qui, aux côtés du président Tshisekedi, d’Emmanuel Macron et de Faure Gnassingbé se sont mobilisés aujourd’hui à Paris pour des millions de femmes et des enfants qui ploient quotidiennement sous le joug des agresseurs et de leurs supplétifs ».
L’administration Tshisekedi est catégorique : « Vouloir marchander ou s’opposer à une intervention humanitaire urgente en faveur de nos compatriotes est non seulement un déni mais aussi une autre preuve de la barbarie et du cynisme de ceux qui gouvernent par crimes ».
Dans ce contexte de confusion, Patrick Muyaya a précisé que, dans ce qui se fera, les Congolais déplacés au Burundi pourront aussi recevoir de l’aide via l’aéroport de Bujumbura.
La bataille (diplomatique) pour la réouverture de l’aéroport de Goma met en lumière les velléités du Rwanda visant à maintenir son influence sur l’est de la RDC, riche en ressources naturelles, où il a déployé, selon les experts de l’ONU, plus de 4000 soldats.





