Le procureur de la Cour pénale internationale (CPI), Karim Khan a présenté mercredi au Conseil de sécurité son trente-sixième rapport sur la situation au Darfour, au Soudan.
Les enquêtes de la CPI concernant le Darfour portent essentiellement sur des allégations de génocide, de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité commis sur ce territoire depuis le 1er juillet 2002.
Karim Khan a déploré le fait que le gouvernement soudanais ne satisfait pas aux exigences en matière de coopération, telles que prévues par le Chapitre VII de la Charte des Nations unies et la résolution 1593. Selon lui, d’importantes promesses, des accords de coopération, des engagements pris par les principaux dignitaires n’ont pas été tenus.
Ainsi, souhaite-t-il, un changement de comportement, en se demandant si les décisions prises par le Conseil de sécurité peuvent être négligées. « Si tel est le cas, quel espoir reste-t-il? Sinon quelles sont les décisions que peut prendre le Conseil pour promouvoir la mise en œuvre des obligations internationales? », s’est interrogé le procureur de la CPI.
Le Soudan n’est pas un État partie au Statut de Rome. Cependant, le Conseil de sécurité de l’ONU ayant, par la résolution 1593 (2005) du 31 mars 2005, déféré à la CPI la situation au Darfour, la Cour peut exercer sa compétence à l’égard des crimes visés par le Statut de Rome et commis sur le territoire du Darfour au Soudan ou par les ressortissants de cet État à compter du 1er juillet 2002.
La conseillère juridique de la France auprès des Nations unies, a estimé que l’enquête ouverte par la CPI sur la situation au Darfour est d’autant plus essentielle en cette période de transition fragile au Soudan. Diarra Dime Labille a appelé les autorités soudanaises à coopérer pleinement avec le Bureau du Procureur et à honorer leurs obligations au titre de la résolution 1593 (2005), des accords de paix de Djouba et des mémorandums conclus avec le bureau du procureur.
Par ailleurs, elle s’est félicitée des progrès réalisés dans l’affaire M. Abd-Al-Rahman, ou Ali Kushayb, première affaire devant la CPI à arriver au procès concernant la situation au Darfour, et première découlant d’une saisine par le Conseil de sécurité.
Dans son intervention, le représentant du Soudan a précisé qu’au cours de la période de demande d’assistance de la part du Bureau du procureur, la compétence exécutive et la responsabilité de collaborer n’ont pas été transmises par le ministère de la justice au ministère des Affaires étrangères, ce qui a empêché de donner effet aux demandes du procureur.
« Il y a une transition entre la guerre et la consolidation de la paix et il est difficile dans l’immédiat d’utiliser des moyens transitionnels de justice », a justifié le diplomate soudanais, ajoutant que son gouvernement entend garantir la justice au Darfour et qu’il a fait montre de sa bonne foi sur cette question.
Quant aux « entraves inutiles » évoquées dans le rapport du procureur, il les a réfutées, estimant que la justice pénale relève de la justice transitionnelle qui n’a pas pu encore avoir lieu en raison des circonstances actuelles au Soudan. Pour le représentant soudanais, c’est la justice réparatrice qui doit être adoptée pour satisfaire aux besoins des victimes.
« La justice pénale exige quant à elle un système de justice pénale intégré qui n’est pas en adéquation selon lui avec les institutions du pays.Il faut donc procéder étape par étape et prendre en compte la diversité culturelle du Soudan », a-t-il plaidé, jugeant que tout cela ne peut être atteint sous la pression.
Reagan Ndota