La RDC est malade de sa justice. Politisation, partialité, instruction bâclée, corruption… Les critiques contre l’appareil judiciaire congolais sont nombreuses. A l’instar du président de la République, Félix Tshisekedi, l’archevêque métropolitain de Kinshasa, Fridolin Ambongo, affirme que la justice dans ce grand pays d’Afrique centrale est « réellement malade ». Il en veut pour preuve « suprême » la conclusion livrée par le procureur général près la Cour de cassation selon laquelle l’opposant Chérubin Okende « s’est suicidé » alors que toutes les preuves convergeraient vers la thèse de l’assassinat.
L’ancien ministre des Transports et député national a été retrouvé mort, criblé de balles, le 13 juillet 2023, dans son véhicule stationné le long de l’avenue des Poids-Lourds, à Kinshasa, la capitale de la RDC.
Devant la presse, le 29 février, le procureur général près la Cour de cassation, Firmin Mvonde, a annoncé qu’après « le recours aux experts en balistique, en télécommunications, après autopsie et analyses toxicologiques, Chérubin Okende s’est suicidé ».
Cette thèse a été remise en cause mercredi 20 mars par le Cardinal Fridolin Ambongo, dans son homélie prononcée lors de la messe célébrée à la cathédrale Notre Dame de Lingwala à l’occasion des funérailles de l’opposant.
« La conclusion incompréhensible à laquelle est parvenue l’enquête est la preuve suprême, s’il en était encore besoin, que la justice dans notre pays est vraiment malade », a-t-il dit avant de s’interroger : « Comment comprendre qu’un un homme aussi passionné de la République puisse aussi facilement se ôter la vie ? Comment en effet comprendre qu’un père de famille aussi attentionné que Chérubin, qui venait de marier sa fille, se soit suicidé en tirant des balles sur lui-même et sur sa voiture ? Si tel est le traitement que la République réserve à un ancien ministre et député national, qu’adviendra-t-il aux simples citoyens ? ».
La justice n’a convaincu personne, surtout pas la famille Okende qui, déterminée à faire éclater la vérité, confirme la thèse de l’assassinat.
« Nous ne croyons pas du tout que Chérubin Okende s’est suicidé. Tout le monde sait qu’il a été assassiné. Il n’était pas allé au marché ni dans un supermarché. Il était allé à la Cour Constitutionnelle. Nous ne sommes pas des amnésiques pour qu’on vienne nous raconter des bêtises. Qu’on ne nous fasse pas taire. Nous n’allons jamais abandonner le combat. Chérubin a été tué, au centre de la ville de Kinshasa », a déclaré le représentant de la famille.
Pour certains, il s’agit d’un « crime d’Etat ». D’ailleurs aux funérailles, les membres du gouvernement étaient « persona non grata ».
« C’est un gouvernement irresponsable. Nous n’avons eu aucun rond ni du gouvernement ni du Parlement. Et nous n’en avons pas besoin d’ailleurs. Gardez votre argent. Ce que nous voulons, c’est la justice », a souligné la famille Okende lors de la levée du corps à la morgue de l’Hôpital du cinquantenaire.
Plusieurs personnalités politiques ont assisté à la messe de requiem, notamment
les anciens candidats à la présidentielle Moïse Katumbi, Martin Fayulu et Delly Sesanga. La famille politique de l’ancien chef de l’Etat Joseph Kabila a été représentée, entre autres, par sa sœur jumelle Jaynet Kabila, Marie-Ange Mushobekwa et Francine Muyumba.