La Commission électorale nationale indépendante (CENI) a lancé un appel à candidatures en vue de constituer une mission mixte d’audit externe du fichier électoral composée d’experts nationaux et internationaux qui, selon la Mission d’observation électorale des Eglises catholique et protestante, risque d’aboutir à un rapport « orienté ou manipulé ».
La MOE CENCO-ECC a décelé des contradictions dans l’appel à candidatures de l’équipe Kadima, dont la légitimité est toujours remise en cause par l’opposition et certaines organisations de la société civile. « Le point 17 indique clairement que la Centrale électorale va recruter des consultants qu’elle-même va organiser pour conduire l’audit du fichier constitué par elle-même. En outre, le point 14 permettra à la CENI de censurer la méthodologie de l’audit (elle doit la valider) et le rapport qui en résultera (elle doit l’approuver) », a-t-elle noté.
Pour cette organisation, ces dispositions sont en contradiction avec une autre du point 17 qui voudrait qu’aucune partie prenante ne soit en situation de conflit d’intérêt. En revanche, fait-elle remarquer, la durée de 6 jours semble insuffisante pour analyser le cadre juridique et règlementaire dont toutes les procédures y afférentes, évaluer l’unicité de chaque électeur de l’échantillon (quelle qu’en soit la taille), évaluer l’inclusivité, l’exactitude et l’exhaustivité du fichier, et rédiger les différents rapports.
« Il ressort de ce qui précède que l’équipe qui sera mise en place par la CENI ne sera pas indépendante et son rapport pourrait être orienté ou manipulé. En conséquence, il y a risque élevé de ne pas trouver un consensus sur le fichier électoral, la méfiance entre les acteurs politiques va être renforcée et la confiance du public au processus électoral va de plus en plus se détériorer. In fine, la crédibilité du processus électoral et des résultats qui en résulteront sera de plus en plus entamée », a-t-elle alerté.
Aussi, la MOE CENCO-ECC prévient la CENI et l’ensemble des parties prenantes que si le processus d’audit externe du fichier est mené comme tel, il y a lieu de craindre la radicalisation du doute sur la sincérité du processus électoral et créer ainsi les conditions de contestations des résultats des scrutins attendus.
La CENI aura ainsi, craint-elle, manqué une de bonnes occasions pour crédibiliser ce processus. « Il est donc de l’intérêt de la CENI et du processus électoral lui-même qu’un organisme indépendant expérimenté sur la matière soit identifié et invité pour réaliser, en impliquant quelques experts nationaux, ce travail dans les délais convenables, respectant les conditions qui préservent la souveraineté nationale, sans offenser l’indépendance dudit organisme », a-t-elle suggéré.
L’audit externe d’un fichier électoral fait partie de bonnes pratiques électorales, rappelle-t-elle, plaidant pour qu’il soit conduit par une organisation ou un organisme indépendant sélectionné dans la transparence, conformément aux principes d’avis d’appels à candidatures et au cahier de charge de l’OGE.
« L’audit du fichier électoral a permis à plusieurs Etats d’obtenir un consensus autour des listes des électeurs et de restaurer la confiance du public au processus électoral ainsi qu’aux résultats qui en ont résulté, ce dont la CENI et le processus électoral en RD Congo ont besoin aujourd’hui », a-t-elle martelé.
La MOE CENCO-ECC a, dans la foulée, annoncé la publication de son rapport final sur l’inscription des électeurs pour le lundi 15 mai 2023 prochain. Elle dit, par ailleurs, attendre encore les réponses à son questionnaire soumis lors des Journées portes ouvertes et a réitéré sa demande à la CENI consistant à la convocation d’un Cadre de concertation où certaines préoccupations liées aux opérations d’identification et d’enrôlement des électeurs devraient être traitées.
L’objectif global de l’audit est, selon la CENI, d’une part, d’évaluer le système actuel d’identification et d’enrôlement des électeurs, afin d’en identifier les forces et les faiblesses et d’en dégager éventuellement des mesures correctives, et d’autre part, de formuler, le cas échéant, des recommandations conséquentes visant à améliorer la qualité et l’intégrité du fichier électoral.