Le vendredi 3 juin, les cadres et militants de l’ECiDé, parti de Martin Fayulu vont, une fois de plus, s’afficher bras-dessus bras-dessous avec les caciques du FCC, famille politique de Joseph Kabila, qu’ils ont toujours accusés de participer à la déstabilisation de l’Est de la RDC et fabriquer les résultats des élections de 2018 ayant conduit Félix Tshisekedi au pouvoir.
Cette marche programmée dans le cadre du Bloc patriotique vise, selon ses organisateurs, à « condamner fermement l’agression flagrante du Rwanda contre la RDC à travers le M23; manifester le soutien total aux FARDC et obtenir des réformes électorales consensuelles ».
D’aucuns se questionnent sur la vraie motivation du « soldat du peuple (Fayulu) » à faire route ensemble avec celui qu’il a présenté comme le « mal congolais ». Au cours d’un meeting tenu en décembre 2019 à Kikwit, le leader de l’ECiDé avait affirmé : « Kabila est arrivé au pouvoir avec une mission, celle d’affaiblir, de diviser le pays afin de parvenir à la balkanisation. C’est pour cela qu’ils ont précipité le découpage territorial. Il a donné la province du Tanganyika à son frère. L’exécution du plan de balkanisation est très avancée », a rappelé un acteur de la société civile.
Au Nouvel Elan, on soutient toute initiative allant dans le sens de défendre l’intégrité du territoire congolais et d’offrir aux Congolais des élections crédibles, transparentes et apaisées, mais « il n’est pas question de marcher avec ceux qui tirent les ficelles de l’insécurité dans l’Est et ont mis en place un système électoral qui a doté le pays des institutions illégitimes ».
Cette position est partagée par le président de l’Association africaine de défense des droits de l’homme (Asadho): « Le FCC s’en prend au gouvernement sur la gestion de la crise avec le Rwanda? Je suis étonné ! Alors que les acteurs du FCC ont géré le pays avec Kagame ( président rwandais Ndlr ) pendant 18 ans. On ne l’a pas oublié », a indiqué Jean-Claude Katende.
Pour l’ancien candidat à la présidentielle de 2018, Alain-Daniel Shekomba, la famille politique de Joseph Kabila n’a aucune leçon à donner aux Congolais, car dit-il : « le FCC et son chef sont les cofondateurs du M23 ».
Nouvel Elan reste fidèle aux idéaux de Lamuka
Le parti du Premier ministre honoraire, Adolphe Muzito, reste fidèle aux objectifs définis dans le cadre de Lamuka, plateforme qui a porté la candidature de Martin Fayulu à la présidentielle de 2018, notamment la défense de la Constitution, spécialement dans ses articles intangibles; la mobilisation du peuple pour une alternance démocratique et politique,reflétant la vérité du choix des électeurs; la promotion d’un État de droit et d’une meilleure gouvernance de la chose publique et l’éradication des antivaleurs.
Muzito a toujours soutenu que « la solution à l’insécurité dans l’Est du pays, c’est d’abord une solution de la défense et non pas sécuritaire. Il faut régler la situation avec le Rwanda, c’est-à-dire faire la guerre au Rwanda… .La solution pouvait se trouver dans le cadre de la CPGL. Tant qu’on fera pas la guerre au Rwanda, on ne mettra pas fin aux questions de sécurité. Donc, il faut d’abord la défense qui nous permettra d’avoir des solutions sur le plan sécuritaire ».
La proposition du leader de Nouvel Elan est soutenue par l’ancien ministre de l’ESU, Steve Mbikayi, qui fait remarquer que « la meilleure défense, c’est l’attaque. Les mesures prises par le gouvernement concernant le Rwanda sont courageuses .Nous devons aller encore plus loin. Rompre les relations diplomatiques avec Kigali et nous préparer à la guerre ».
Joseph Kabila et le M23
Vaincus en 2013, les rebelles du «Mouvement du 23 mars», font de nouveau parler d’eux. Les 28 et 29 mars 2022, les rebelles sont sortis de leurs bastions d’altitude pour attaquer des positions de l’armée, notamment à Runyoni et Tchanzu, région où huit soldats de l’ONU sont morts dans le crash de leur hélicoptère le 29 mars, encore inexpliqué.
D’après le gouvernement congolais, le M23 est soutenu par le Rwanda. Deux soldats rwandais ont même été arrêtés. La Commission des Affaires étrangères du Sénat des États-Unis (USA) a promis des sanctions. « Alarmé par les informations selon lesquelles le Rwanda soutient à nouveau les rebelles du M23 fomentant la violence, attaquant les troupes de la RDC, les casques bleus de l’ONU et les civils. Nous devons enquêter et sanctionner les responsabilités ».
Alarmed by reports that Rwanda is again supporting M23 rebels fomenting violence, attacking DRC troops, UN peacekeepers, and civilians. We must investigate and sanction those responsible. https://t.co/yMgHP4JvMV
— Senate Foreign Relations Committee (@SFRCdems) May 28, 2022
Boniface Musavuli, spécialiste des questions sécuritaires et des droits de l’homme, souligne que « le M23 est le résultat des politiques de brassage/mixage/amnistie pratiquées par Joseph Kabila pendant des années. Raymond Tshibanda/FCC ( ancien ministre des Affaires étrangères Ndlr) est même le signataire de l’accord du 23 mars 2009, d’où l’acronyme M23 « .
Selon un rapport de l’ONG internationale Human Rights Watch (HRW), les combattants du M23 ont été recrutés entre octobre et début décembre 2016 dans des camps militaires et de réfugiés en Ouganda et au Rwanda, où de nombreux combattants du M23 sont basés depuis la défaite du groupe armé dans l’Est de la RD Congo en novembre 2013.
Une fois en RD Congo, les combattants du M23 ont été déployés dans la capitale, Kinshasa, et dans les villes de Goma et de Lubumbashi dans l’Est et le sud du pays. Ils ont reçu de nouveaux uniformes et des armes et ont été intégrés dans la police, l’armée et des unités de la Garde républicaine, le détachement de sécurité présidentielle. Des officiers des forces de sécurité congolaises dont bon nombre étaient issus de rébellions précédentes soutenues par le Rwanda et avaient ensuite été intégrés dans l’armée congolaise se sont occupés d’eux, les payant bien et leur fournissant un logement et de la nourriture, a révélé HRW.
Pour protéger le président (Kabila) et étouffer les manifestations, les combattants du M23 ont reçu des ordres explicites d’utiliser la force létale, y compris à « bout portant » si nécessaire, a souligné cette ONG.
La Rédaction