La coalition Lamuka n’est pas divisée. Les deux membres du présidium entretiennent toujours de bonnes relations et poursuivent la résistance afin d’offrir aux Congolais des institutions légitimes.
La seule divergence (surmontable) qu’il y a entre Nouvel Elan et ECiDé est la question du bloc patriotique, structure créée par Martin Fayulu à l’insu de son partenaire Adolphe Muzito, composé notamment du FCC de Joseph Kabila, accusé pourtant par Lamuka d’être à la base du hold-up électoral qui a porté Félix Tshisekedi au pouvoir.
Alors que Fayulu a accepté de faire bloc avec le FCC, Muzito, fidèle à ses convictions, pense que la famille politique de l’ancien chef de l’Etat n’est pas un « allié approprié » pour mener le combat de la vérité des urnes et lutter contre la fraude électorale. Cependant, le Premier ministre honoraire estime cette divergence peut être dépassée pour l’intérêt du peuple congolais.
« Mon parti et moi avons dit non à ce bloc patriotique parce que nous considérons qu’on ne peut pas s’appuyer sur celui qui a fait le péché pour combattre celui qui a profité du péché. Donc, nous pensons que le FCC n’est pas un allié approprié pour lutter contre la fraude électorale et pour la vérité des urnes, parce que ce sont eux qui sont à la base de cette situation. C’est ça d’ailleurs qui fait la divergence entre l’ECiDé et Nouvel Elan ; Martin Fayulu et moi. Évidemment, c’est une divergence qui peut être dépassé, j’espère parce qu’il faut maintenir Lamuka comme force de résistance », a-t-il dit.
« Les alliances politiques doivent se faire sur base de la convergence des programmes »
Les erreurs commises en 2018 à Genève doivent être corrigées. Il n’est plus question de débattre sur des individus, pour chasser le régime en place. Muzito est catégorique : les alliances politiques et électorales doivent se faire sur base de la convergence des programmes.
« Le moment venu s’il se dégage des convergences autour de nos programmes respectifs à Martin et à moi ; son parti et au mien, mais aussi avec d’autres forces politiques et sociales, c’est sur cette base là que les alliances politiques et électorales pourront avoir lieu », a expliqué le coordonnateur de Lamuka.
Dans la foulée, Muzito déconstruit les mensonges selon lesquels il se serait allié avec l’actuel régime. « Je suis toujours résistant dans Lamuka, je suis toujours dur par rapport à monsieur Tshisekedi et à l’Union sacrée », a-t-il affirmé.
L’analyse de Tresor Kibangula, membre de l’Institut congolais de recherche sur la politique, la gouvernance et la violence
Il faut toute suite nuancer « l’appartenance à la même famille politique ». Que ça soit Martin Fayulu ou Adolphe Muzito, chacun a son propre parti politique. En 2018 avec d’autres leaders de l’opposition, ils avaient créé la plateforme Lamuka qui avait présenté Martin Fayulu comme le candidat commun de l’opposition.
A l’issue de la présidentielle de décembre 2018, Lamuka a revendiqué la victoire de son candidat, mais c’est Félix Tshisekedi qui a été proclamé vainqueur. Alors de la plateforme électorale, Lamuka est devenue une sorte de mouvement politique pour revendiquer, dans un premier temps, la vérité des urnes refusant alors de reconnaître le président proclamé, Félix Tshisekedi. C’est à ce moment-là d’ailleurs qu’on a commencé à voir les premières fissures au sein de Lamuka, car certains leaders, notamment Moïse Katumbi, avaient décidé de s’inscrire plutôt dans une opposition républicaine. Plus tard avec Jean-Pierre Bemba, Katumbi rejoindra même l’Union sacrée de la nation, coalition mise en place autour de Félix Tshisekedi, même si aujourd’hui, Katumbi ne peut pas vraiment être considéré comme un allié de Tshisekedi.
Au sein de Lamuka, il ne restait plus que Adolphe Muzito et Martin Fayulu. Mais ce tandem n’avait plus rien d’une coalition en vue de prochaines élections. Pas surprenant à mon sens qu’après la désignation de Martin Fayulu, mi-juillet, comme candidat à la présidentielle par son parti, monsieur Muzito aussi affiche ses ambitions présidentielles. Ce dernier précise d’ailleurs qu’il travaille d’abord sur un projet de société et que ce sera en fonction des programmes politiques que les futures alliances pourraient se faire.
Est-ce que ceci va freiner l’opposition ? A mon sens, oui et non. oui, parce que pour un scrutin présidentiel à un tour, les candidatures qui se multiplient du côté de l’opposition feront sans doute les affaires du président sortant. Non, parce que peu importe finalement le nombre des candidats, il suffira d’une majorité même relative des suffrages pour l’emporter. Encore faut-il que les élections à venir soient transparentes, ce qui n’est pas gagné.
(Cependant), la principale divergence entre Fayulu et Muzito, c’est le choix de Martin Fayulu de créer le bloc patriotique. On a retrouvé dans ce bloc, le FCC de Joseph Kabila. Pour Adolphe Muzito, il n’est pas question de s’allier avec ceux qui, hier, avaient en quelque sorte volé la victoire de Lamuka.
Reagan Ndota